mercredi 20 février 2013

Les Véhicules Spatiaux et Terrestres

          Dans la galaxie de Star Wars, les vaisseaux abondent et possèdent deux modes de propulsion qui leur permettent non seulement d'évoluer dans une atmosphère ou dans l'espace d'un système planétaire, mais aussi de s'en éloigner suffisamment pour faire un saut dans l'hyperespace afin de franchir les gigantesques distances qui séparent les étoiles les unes des autres. Dans le premier cas, la vitesse du vaisseau est relativement faible, inférieure à la vitesse de la lumière. On parle alors de « vitesse subluminique ». En revanche, le saut dans l'hyperespace permet de dépasser la vitesse de la lumière afin de parcourir les distances interstellaires en quelques jours. Voyons comment pourraient fonctionner ces deux modes de propulsion.

La vitesse subluminique

Des chasseurs impériaux.

          Le moteur subluminique que l'on trouve dans Star Wars est un propulseur ionique, qui équipe aussi bien les intercepteurs impériaux TIE (Twin Ion Engine que l'on peut traduire par « moteur à double flux ionique ») que les chasseurs Ailes-A de la rébellion. Il est amusant de constater que cette technologie a déjà été utilisée, dans la réalité, par deux petites sondes humaines.

          La sonde Deep Space 1, lancée le 24 octobre 1998 par la NASA, avait pour mission de tester et de valider douze nouvelles technologies spatiales, dont la principale était la propulsion ionique. Plus récemment, le 27 septembre 2003, la sonde européenne Smart 1 quittait la Terre en direction de la Lune, qu'elle atteignait après un périple de treize mois. L'une des principales missions de Smart 1 était aussi l'évaluation des performances de la propulsion ionique.

          Le principe du moteur ionique consiste à ioniser un gaz inerte, comme le xénon, à l'aide d'un fort courant électrique, c'est-à-dire à produire des particules chargées, les ions, au sein de ce gaz. Ensuite, un champ électrique intense accélère les ions produits qui, éjectés par une tuyère, propulsent le vaisseau dans la direction opposé à leur flux. Ce mode de propulsion est très économe : à puissances égales, un moteur ionique consomme dix fois moins de combustible qu'un moteur de fusée classique à base d'ergols. Il suffit juste d’un peu de xénon, et d’un peu d'électricité fournie par des panneaux solaires par exemple. En revanche, la poussée est plus réduite, même si la vitesse d'éjection du gaz propulseur est bien supérieure à celle d'un moteur de fusée conventionnel. La poussée est même si faible que le décollage d'une fusée à propulsion ionique est impossible. En revanche, la poussée peut-être délivrée durant des années, tandis que les moteurs classiques de fusées, plus puissants, consomment leurs ergols en quelques minutes seulement. Une fois dans l'espace, le moteur ionique permet de manœuvrer le vaisseau, contrairement aux sondes classiques dont la trajectoire n'est fixée que par les conditions du décollage : jour, heure et direction du tir. C’est bien de manœuvrer, mais il ne faut tout de même pas être trop pressé : en effet, les moteurs ioniques actuels ne produisent que des accélérations assez faibles et sont tout à fait incapables d'exécuter les acrobaties que réalisent les chasseurs interstellaires de Star Wars. Il n'en reste pas moins que, sur ce point, notre technologie est assez peu éloignée de celle de la fiction.

L'hyperespace

          Dans Star Wars, le moyen le plus rapide pour aller d'un point à un autre est de passer par l'hyperespace, raccourci permettant, du point de vue de l'Univers réel, de parcourir une distance fabuleuse en un temps ridicule. Quelle est la nature de cet hyperespace? Pourrait-il être un Univers parallèle? La réponse ne peut qu’être négative si on estime que les astrophysiciens définissent concrètement l'Univers comme l'ensemble des choses qu'ils peuvent observer dans leurs instruments. Dans cette hypothèse, cet Univers observable est forcément fini, car l'Univers a un âge fini. Dans ce cadre, les Univers parallèles n'ont guère de place. S'ils sont en rapport avec nous, de manière directe ou indirecte, ils font partie de notre univers observable et doivent perdre le qualificatif de « parallèles ». On peut en parler même si nous ne pouvons ni interagir avec eux ni les observer,  mais le discours à leur sujet n'a alors aucun caractère scientifique et sort du champ de la physique expérimentale.

          Si l'hyperespace semble être peu cohérent, que peut-on imaginer qui permette d'améliorer les délais imposés par les gigantesques distances interstellaires? En 1994, le physicien Miguel Alcubierre a proposé un moyen de déplacement original basé sur une bulle d'espace en mouvement transportant son contenu. L'intérêt de cette idée réside dans le fait que, du point de vue d'un observateur extérieur à la bulle, la vitesse de celle-ci peut-être supérieure à celle de la lumière alors que, localement, le voyageur ne se déplace jamais plus vite que la lumière. Étudions ce fonctionnement.

          Dans une théorie publiée en 1915, Einstein montre que la gravitation n'est qu'une manifestation de la courbure de l'espace imposée par la matière qu'il contient. Soumis à la seule action de la gravitation, les corps se déplacent d'un point à un autre en suivant une des lignes de plus court chemin, appelée « géodésique », qui n'est pas toujours une ligne droite. L'espace est donc une entité modelée par son contenu matériel et qui, en retour, fixe la dynamique de la matière. Dans ce cadre, il existe plusieurs moyens pour diminuer le temps de parcours entre deux points. Le premier, qui est aussi le seul auquel nous pensons spontanément, est classique : il faut augmenter la vitesse. Mais avec un espace malléable, une autre solution est envisageable : il suffit de diminuer la distance à parcourir en déformant l'espace pour rapprocher la position à atteindre! La solution proposée par Alcubierre est une bulle devant laquelle l'espace se contracte et derrière laquelle il se dilate. Cette asymétrie locale de la géométrie de l'espace crée un mouvement vers l'avant sans que l'espace extérieur lointain soit modifié.

          Cette théorie semblait parfaite jusqu'à ce que le physicien russe Serguei Krasnikov démontre qu'il est impossible de contrôler cette bulle. La déformation de l'espace est telle qu'un signal lumineux envoyé par un voyageur situé à l'intérieur de la bulle ne peut jamais atteindre sa surface. Si même la lumière ne peut atteindre la surface de la bulle, c'est qu'il est, de fait, impossible de contrôler celle-ci depuis l'intérieur. Elle ne peut être ni créée, ni arrêtée. Krasnikov a donc proposé une autre solution : plutôt que de former une bulle, il propose de déformer l'espace dans le sillage du vaisseau au fur et à mesure qu'il progresse vers sa destination. À l'aller, à une vitesse subluminique, le vaisseau creuse donc une sorte de tunnel dans l'espace-temps. Une fois son but atteint, il l'empruntera au retour. Bien construit, ce tunnel présente un intérêt majeur : pour un observateur terrestre, un voyageur qui l'emprunte peut revenir à un instant arbitrairement proche de son départ, sans toutefois pouvoir revenir avant d'être parti. Du point de vue terrestre, le voyageur semble dépasser la vitesse de la lumière en empruntant le tunnel dans lequel l'espace a été déformé. Le voyageur mesurera, quant à lui, un temps de parcours qui sera d'autant plus court qu'il se déplacera à une vitesse proche de celle de la lumière. En effet, « plus on va vite, plus le temps est court » comme l'a dit Einstein. En ajustant la déformation de l'espace effectuée lors du voyage aller, le voyageur peut aussi faire en sorte que les temps de voyage mesurés par un observateur terrestre et par lui - même soient égaux. Même si le tunnel de Krasnikov permet de dépasser la vitesse de la lumière du point de vue terrestre, toute la trajectoire aller-retour est parcourue à une vitesse localement inférieure à celle de la lumière. Pour résoudre le problème de la durée excessive des voyages interstellaires, il suffit donc d'établir un vaste réseau de ces tunnels de Krasnikov. La construction sera longue, , car, pour le construire, il faudra préalablement parcourir tout le réseau à vitesse limitée. Une autre difficulté plus grave encore est mise en évidence: la construction d'un tunnel nécessite d'utiliser une matière dite « exotique », encore jamais détectée et qui, contrairement à la matière ordinaire, a une énergie négative. Mais une piste semble se dessiner.

          L'observation de notre univers tend a prouver que, lors de son évolution, il a subi une phase d'expansion accélérée au cours de laquelle cette matière exotique était prédominante. Lors de cette phase d'inflation, deux points initialement très proches ont été éloignés exponentiellement, ce qui permet expliquer que notre Univers soit actuellement quasiment, à grande échelle, homogène, c'est-à-dire que son apparence générale ne dépende pas de la position de l'observateur, et isotrope, c'est-à-dire que son aspect ne dépend pas de la direction dans laquelle on l'observe. L'observation du fond diffus cosmologique, qui est un rayonnement lumineux émis il y a 13,7 milliards d'années lorsque l'univers en expansion est devenu transparent à la lumière, réalisée par le satellite WMAP (Wilkinson Microwave Anisotropy Probe), confirme ces points. Par ailleurs, des observations récentes semblent montrer que l'expansion de l'univers va en s'accélérant. Étant donné que la matière ordinaire, d'énergie positive, a tendance à ralentir l'expansion, cette accélération n'est explicable que s'il existe encore une quantité non négligeable de cette matière exotique. Il est probable que les scientifiques de Star Wars ont compris tant de choses sur la nature de l'espace qu'ils sont capables de moissonner cette énergie négative. Quant à nous, il est à craindre que nous ne puissions prendre le métro interstellaire avant de nombreuses années…

Le landspeeder

Un landspeeder conduit par C3PO et Luke Skywalker.


          Comment les landspeeders, qui sont des véhicules servant aux déplacements courants à la surface de Tatooine, peuvent-ils flotter au-dessus du sol sans support apparent? L'idée la plus simple consiste à doter le véhicule d'un système à coussin d'air, comme ceux équipant les aéroglisseurs qui font la traversée de la Manche. Dans ce dispositif, la force qui maintient le véhicule en lévitation résulte d'un fort courant d'air soufflé vers le bas par de puissantes turbines. Pour flotter en permanence, comme le font les landspeeders, il faut bien sûr souffler de l'air en continu et le piéger par une sorte de « jupe » fixée tout autour du véhicule. Deux arguments imparables obligent à abandonner cette séduisante hypothèse. Tout d'abord, aucune jupe n'est montée sur les lanspeeders. De plus, les nuées de sable que le fort courant d'air devrait soulever sur la désertique planète Tatooine sont totalement inobservables.


          Une autre solution consiste à utiliser un dispositif de lévitation magnétique comme ceux des Maglevs, ces TGV expérimentaux japonais qui flottent au-dessus des rails. Dans ce cas, la sustentation est obtenue en opposant, dans le train et sur les rails, des aimants de polarités identiques. Cette idée a un inconvénient évident : pour se déplacer en flottant au-dessus du sol, il faut suivre des rails dont on ne voit nulle trace dans le sol de Tatooine.

          On peut aussi faire léviter des objets en les plongeant dans un champ magnétique intense ou variant rapidement dans l'espace. Ainsi, des scientifiques ont fait léviter des insectes et même une grenouille, en les plongeant dans un champ magnétique. Pour léviter, la grenouille devait rester à l'intérieur de la toute petite zone d'expérience. Cette contrainte est contraire au principe même du véhicule, qui est fait pour nous amener où bon nous semble.

          Si les idées simples et réalisables issues de la technologie du XXIème siècle ne peuvent fonctionner, il faut se tourner vers un concept déjà introduit dans la science-fiction : l'anti-gravité. Ne serait-il pas possible d'imaginer un dispositif capable de faire écran au champ gravitationnel? En effet, une simple cage métallique, dite cage de Faraday, permet de se prémunir totalement des influences électromagnétiques extérieures. Imaginons que nous disposions d'un dispositif capable de masquer le champ de gravité. Montons dessus et branchons-le. Nous « tombons » alors  vers le haut, puisque le champ de gravité situé sous l'engin est annulé. C'est d'ailleurs peut-être ainsi que fonctionnent les tapis volants. Si vous en trouvez un, essayez de comprendre comment ils se pilotent avant de les activer, sinon vous risquez d'atteindre le vide intersidéral plus vite que vous ne le souhaiteriez... Mais tel n’est pas notre sujet!

          Si à l’heure actuelle, rien ne semble soutenir l’idée qu'il puisse exister un moyen de masquer le champ gravitationnel, il reste en revanche possible de créer un champ qui annule localement la gravité de la Terre. Pour comprendre le fonctionnement de ce dispositif, constatons d'abord qu'il y a une grande similarité entre le champ électrique et le champ gravitationnel. Ainsi, le champ électrique d'une charge ponctuelle est radial, c'est-à-dire qu'il rayonne dans toute les directions et proportionnel à la charge électrique et à l'inverse du carré de la distance à la charge. Nous savons, grâce à Newton, que le champ gravitationnel d'une masse ponctuelle se comporte de façon semblable : il est radial et proportionnel à la masse et à l'inverse du carré de la distance à la masse. Dans la théorie électromagnétique, le champ électrique est toujours complété par un champ magnétique. Pourquoi ne pas pousser l'analogie jusqu'au bout et compléter la théorie classique de la gravitation en adjoignant au champ de gravité un nouveau champ, analogue au champ magnétique?

          En électromagnétisme, le champ électrique trouve sa source dans les charges électriques, et le champ magnétique est créé par un déplacement de ces charges. Ce phénomène fut découvert en 1820 par le physicien danois Hans Christian Oersted (1777-1851), qui constata que l'aiguille d'une boussole était dévié par un courant électrique. Notons au passage que cela implique que les champs électriques et magnétiques ne sont pas aussi différents qu'on l’imagine. Une charge produit donc un champ électrique et, mise en mouvement, elle crée aussi un champ magnétique qui n'est perçu que par les observateurs ayant un mouvement par rapport à la charge. Le champ magnétique n'est donc pas un champ différent, mais un champ électrique vu depuis un référentiel en mouvement.

          Fort de l'analogie entre champs électrique et gravitationnel, nous pouvons affirmer l'existence d'un champ qualifié de « gravitomagnétique », couplé au gravitationnel comme le champ magnétique l'est au champ électrique : il trouve son origine dans les mouvements de la matière. L'existence de ce champ peut être aussi fondé sur une base plus solide que celle qu'offre notre analogie. La théorie de la gravitation mise au point par Einstein au début du XXème siècle généralise en effet celle de Newton : Einstein contient la théorie de Newton, prouvant qu'elle n'est valable que lorsque le champ gravitationnel est faible et que les mouvements se font à des vitesses plus lentes par rapport à celle de la lumière. Ces simplifications appliquées à la théorie d'Einstein conduisent aussi à l'apparition de termes de faible amplitude , qui se comportent à la manière du champ magnétique en électromagnétisme. Ainsi, un courant de matière engendre un champ gravitomagnétique qui exerce une force sur les masses, comme le champ magnétique le fait sur les charges. Ainsi, la rotation de la Terre crée un champ gravitomagnétique qui perturbe faiblement le mouvement d'un corps en orbite. Cet effet fut prédit en 1918 par les physiciens autrichiens Joseph Lense et Hans Thirring, et le futur satellite LAGEOS III servira à mesurer avec précision les conséquences de la rotation de la Terre sur l'orbite des satellites.

          En 1831, le physicien anglais Michael Faraday (1791-1867) découvrit l'induction électromagnétique en montrant qu'un champ magnétique variable dans le temps engendre aussi un champ électrique. C'est sur ce principe que repose le fonctionnement des plaques de cuisson à induction, dans lesquelles circule un courant électrique variable. Cette idée peut aussi être utilisée pour arriver à nos fins : un courant de matière variable dans le temps crée un champ gravitomagnétique variable qui induit un champ gravitationnel. Il faut maintenant savoir comment l'on peut mettre cette idée en pratique. Remplissons de matière un tuyau adoptant la forme d'une spirale se refermant sur elle-même, comme un solénoïde torique. La matière accélérée dans le solénoïde engendre un champ gravitomagnétique variable qui induit un champ gravitationnel. Correctement orienté, ce dispositif s'oppose au champ terrestre et, si le tout est bien calculé, le champ gravitationnel induit annule le champ terrestre : le landspeeder lévite! Or il y a toujours quelques difficultés. Quelle matière peut-on mettre dans le tube? Du fait de la faiblesse du champ induit par de la matière ordinaire, il est nécessaire de prendre un corps vraiment dense, une étoile à neutrons par exemple. Cela risque de poser problème, car la matière d'une étoile à neutrons ne peut garder son énorme densité, qui est des milliards de tonnes par centimètre cube, seulement si elle reste confinée dans l'étoile. De plus, il faut que l'accélération soit extrêmement importante pour que la matière contenue dans le tube atteigne la vitesse de la lumière en quelques millièmes de secondes. La prouesse serait extrêmement brève. De plus,  à ces difficultés s'ajoute celle du prix scandaleux que cela coûterait. Le landspeeder ne serait donc pas très populaire en période de crise...

Le quadripode TB-TT

          Les quadripodes de combat font aussi partie des véhicules marquants de la saga Star Wars. Énormes éléphants mécaniques, leur taille immense et leur puissance frappent l'ennemi de stupeur, comme les éléphants d'Hannibal stupéfièrent les troupes romaines à la bataille de Cannes. La comparaison s’arrête là, car contrairement aux éléphants, les quadripodes n'avancent qu'une seule patte à la fois. Leur taille est gigantesque et peut être estimée lors d’une séquence de l'épisode V où l'on voit clairement Luke Skywalker grimper le long d'un câble pour attaquer l'un de ces monstres. Un arrêt sur image et un double décimètre montrent que, quinze fois plus grand que le héros, le quadripode doit dépasser 25 mètres de hauteur. Si l'on oublie la terreur qu'ils peuvent inspirer, il est permis de douter du fait que ces engins soient de bonnes armes de combat. En effet, ils sont trop hauts sur pattes. L'essentiel de la masse étant concentrée dans le « corps », leur centre de gravité est placé très loin du sol. Un quadripode est donc facile déséquilibré, comme l'on peut le voir dans le film où les rebelles les renversent avec des câbles. De plus, ils ne doivent pas être faciles à conduire sur un terrain accidenté. Par ailleurs, les articulations des membres sont autant de points faibles que les intercepteurs rebelles peuvent atteindre pour immobiliser l'engin. Enfin, leur taille les contraint sûrement à une mobilité réduite et ils ne peuvent supporter une attaque par l'arrière que du fait d’un blindage très épais, augmentant d'autant le poids de la bête. Une chute ne peut avoir que des conséquences catastrophiques Avec une taille et une masse si considérables. Comme on peut le voir, l'Empire n'a pas toujours des bonnes idées.